La guerre de Hamas contre Israël soulève des nouvelles problématiques, qui se répètent dans l’histoire humaine du Proche-Orient. Elles sont liées aux différents volets du droit international, qui ne trouvent pas d’unanimité dans leur définition, mal interprétée par certains acteurs des relations internationales, et renvoient vers les crises humanitaires. Les défis concernent l’interprétation de la législation internationale par les forces rivales et leurs alliés, concernent le fléau terroriste ou de la résistance, la protection par l’Etat des sujets en difficulté et l’interprétation du droit humanitaire par les adversaires en présence.

Une permanente ambiguïté sur le terrorisme ou la résistance

En effet la définition du terrorisme est restée subjective et n’a pas encore trouvé une acceptation par toute la communauté internationale. Alors que certains pays déclarent qu’Israël applique le terrorisme dans son voisinage direct contre les populations arabes. D’autres acteurs comme l’Union Européenne et plusieurs Etats de cette organisation voient que l’Etat hébreu est le seul à être démocratique au Moyen-Orient avec les normes occidentales et que c’est Hamas qui constitue un groupe terroriste. Mais, certains Etats de cette commission européenne n’inscrivent pas le Hamas parmi les organisations terroristes et ne veulent pas arrêter leur aide financière destinée aux palestiniens, en particulier à l’Organisation de libération de Palestine (OLP).

Parallèlement d’autres pays soulignent que la démocratie israélienne est limitée à l’instar de la cité antique grecque, qui n’accordait les privilèges qu’aux citoyens et non pas aux métèques ou aux esclaves. Sinon, on qualifie le pays d’appliquer l’apartheid sud-africaine. D’autres pays du monde accorde le qualificatif de résistance au Hamas dont les combattants se sacrifient de façon héroïque à l’indépendance des territoires occupés.    

 Hamas créé en 1987 au début de la première Intifada, par les frères musulmans[1] a pu prendre le contrôle de Gaza longtemps sous l’égide du FATEH et choisi de s’approcher par la suite, des régimes qui sont en étroite relation avec la confrérie, principalement la Turquie et le Qatar. Ses principaux leaders sont rétablis dans ces deux Etats. Le mouvement est aussi en étroite relation avec la République Islamique d’Iran. Néanmoins, la création de ce mouvement avait comme but de diminuer du rôle de l’OLP en Palestine. Israël est aussi très concernée par cette création qui voulait tant, diviser les palestiniens. 

Dans tous les cas, la communauté internationale s’est préoccupée après le deuxième conflit mondial à chercher la définition du terrorisme, sans trouver ni issue à ce terme, ni solution compatible pour l’éradiquer. Il a fallu attendre les résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies, 1267/1999 contre les Talibans et 1368/2001contre Al-Qaida pour définir les actes classés dans la catégorie terroriste. Toutefois, une définition universelle, n’existe pas et chacun qualifie l’autre de terroriste selon ses intérêts vitaux. Comme à l’accoutumée, les occidentaux continuent de confirmer leur soutien au droit d’Israël à l’autodéfense et condamnent le Hamas en tant que groupe terroriste. 

Ainsi, on se demande est ce que l’incursion du Hamas ou la riposte israélienne ne sont que le résultat du cumul de plusieurs décennies d’affrontements et d’un vide flagrant en accords de paix ? N’a-t-on pas choisi auparavant le territoire contre la paix ? N’est-il pas vrai qu’on ne veut pas tourner la page et vivre en paix ? On se demande aussi que faisaient les binationaux dans la bande frontalière ?

Une énigme autour de la protection des disparus

Ensuite, lors de l’opération Toufane Al Aksaa, en plus des morts, le Hamas a signalé avoir pris en plus du butin matériel, des prisonniers et des otages.  Les Etats Unis d’Amérique, la France[2] et d’autres Etats continuent de faire le compte des morts et des disparus qui portent leurs nationalités. Parmi les victimes civiles considérées collatéraux par le Hamas, on trouve ceux qui ont une autre nationalité en plus de celle israélienne. Ce qui fait qu’en choisissant la nationalité de l’Etat hébreu, vivant en Israël et appliquant les lois du pays, leur traitement pourrait être du ressort du droit interne israélien. Comment vat-on considérer un commis de l’Etat (sécuritaire ou militaire) qu’il a une autre nationalité ? N-est-elle pas une façon de légitimer la guerre contre le Hamas ?

Un Français en cas de binationalité ne peut utiliser sa nationalité française, pour se distinguer dans un Etat de résidence où il a aussi   la nationalité. Car, tout simplement, il est considéré ressortissant du pays de résidence. Donc, les disparus (prisonniers, otages ou morts sans être retrouvés) français, que défend les gouvernements occidentaux, sont plus israéliens que français, puisqu’ils résident et font partie de l’administration, des services parallèles ou des forces de défense de l’Etat hébreu.  

Dans ce cas, les Falachas, les juifs russes, arabes et autres qui ont disparu ou succombé lors de l’opération du Hamas, doivent avoir le même régime de protection ! Sinon, dans ce type de situation, l’interprétation de la binationalité change d’un Etat à l’autre selon sa puissance et ses intérêts vitaux.

Certes, si les disparus, sont des civils français de passage et non résidants à vie, la donne et l’interprétation de la protection des binationaux pourraient changer. Les pays d’origine ont le devoir de protéger leur population en difficulté à l’étranger par les moyens diplomatiques et s’il le faut par des actions militaires. Mais, à vrai dire dans ces circonstances précises les binationaux, ne peuvent passer le service militaire ou exercer dans deux armées distinctes. Désormais, ils doivent défendre un seul drapeau. Et c’est celui de leurs origines ou celui du pays où ils vivent définitivement et non pas de leur vie à mi-temps.  Cette façon choisie par certains Etats de protéger des sujets qui ne vivent pas en permanence sous leur coupole est aussi liée à un défi en matière de compréhension des droits humanitaires.

 Une interprétation subjective du droit international humanitaire

Enfin, l’injustice existe déjà dans le jugement des rivaux par certains acteurs des relations internationales qui véhiculent l’idée, qui incarne en Israël la bonté et la méchanceté au Hamas. Le monde a oublié que les accords d’Oslo ont été mis de côté. C’était l’OLP qui a été l’acteur principal de cette paix avec Israël. Parmi les dispositions clés des accords israélo-arabe, la solution de deux Etas distincts. Mais au lieu d’appliquer cette ancienne convenance, du côté israélien, on a choisi de construire sans arrêt et sans respect des promesses, de nouvelles colonies. Et ce, sans lâcher la pression ni en Cisjordanie, ni à la Bande de Gaza, depuis plusieurs années. Les bombardements de civils de Gaza, la privation des populations de l’eau, de l’électricité   et de la nourriture sont devenus une coutume, pour punir le Hamas. 

Par ce fait, dans le cadre du droit international humanitaire, tout d’abord, la violence contre les civiles est devenue une monnaie courante par les deux antagonistes. Pendant plusieurs années ce choix de construction de nouvelles colonies n’a fait   engendrer que les violences et les ripostes israéliennes disproportionnées sont devenues tolérables. Jamais on n’a voulu trouver une solution juste aux origines du problème qui dure depuis plusieurs décennies.    

Viennent aussi, s’ajouter aux difficultés créées par les dommages collatéraux touchant civils israéliens, ceux de la Bande de Gaza qui ont fui[3] vers les environs de la ville ou ont choisi comme hébergement de circonstance, les écoles. Les deux antagonistes continuent de signaler les décès des femmes, des enfants et des personnes civiles non combattantes. Le Hamas déclare le bombardement des infrastructures civiles et des ambulances, l’utilisation des munitions interdites par les Nations Unies, la coupure de l’eau et de l’électricité et la famine provoquée par le siège complet de la bande de Gaza. Israël n’a pas manqué, à son tour de signaler lors et après l’opération Toufane Al Aksaa, un massacre humain, qu’elle qualifie de crime contre l’humanité[4]

Cette fois-ci les déplacés palestiniens de Gaza ont bien saisis les leçons de 1948, 1956 et 1967[5]. Leurs frères qui ont fui les combats par le passé, sont toujours désespérés, en Jordanie, au Liban et partout dans le monde, dans l’attente d’un retour presque impossible. Ils vivent dans des ghettos et souffrent lentement.   

Malgré les bombardements intenses, les Gazaouis ont préféré développer leur résilience et survivre dépourvus de tous les moyens logistiques. Subsister un choix difficile que leurs voisins partagent avec eux. Leurs frères en Jordanie, au Liban et en Syrie avaient passé des mauvais moments suite à leur ingérence dans les pays d’exil. Certains palestiniens ont misé leur déplacement sur le Sinaï qui est proche de Gaza.  

C’est aussi une grave erreur. Car, l’histoire va se répéter et les égyptiens sont très conscients des séquelles que pourraient engendrer le déplacement des palestiniens dans leur territoire. Pourtant, sur le volet humanitaire, la population de Gaza continue de payer les erreurs des deux antagonistes, qui n’ont pas trouvé un terrain d’entente, favorable à une paix durable.


[1] Il s’agit de symboles de la résistance islamique palestinienne le cheikh Ahmed YASSIN, Abdel Aziz al-RANTISSI et Mohammed TAHA.

[2] D’ailleurs, à partir du 05 mars 2009, la France n’applique plus le chapitre I de la Convention du Conseil de l’Europe du 6 mai 1963, sur la réduction des cas de pluralité de nationalités et sur les obligations militaires.  De ce fait, en droit privé français, l’obtention volontaire de la nationalité d’un autre Etat   ne veut pas dire la perte de la nationalité d’origine. Lire Convention européenne sur la nationalité : https://r.search.yahoo.com/_ylt=Awr.ns60MS1lAisz6EUk24lQ;_ylu=Y29sbwNpcjIEcG9zAzIEdnRpZAMEc2VjA3Ny/RV=2/RE=1697489461/RO=10/RU=https%3a%2f%2frm.coe.int%2f168007f2df/RK=2/RS=QMI9aVWDb5S33KCrvvoMRT0fz.Q-

[3] Selon plusieurs sources onusiennes, le nombre des déplacés a déjà dépassé les un millions de personnes et ceux qui habitent les écoles dépassent les 60 000.

[4] Suite à ce qui se passe à Gaza, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a déclaré que « même les guerres ont des règles » et que « Le droit international humanitaire et le droit des droits de l’homme doivent être respectés et défendus. Les civils doivent être protégés et ne jamais être utilisés comme boucliers ». Voir ONU info l’actualité mondiale un regard humain sur https://news.us15.list-manage.com/track/click?u=372753f560ef60c400f1a4f3f&id=1ac4dabb27&e=48b288187d

[5] Pendant chaque conflit arabo-israélien, tels que les dates sont citées, les populations palestiniennes se déplaçaient vers les pays voisins pour fuir les combats.