Coincé par sa frontière fragile au niveau interne et régional, le Soudan du Nord est touché par les malheurs apportés par sa richesse minière et devenu une victime des convoitises régionales et internationales. Toutes les portes ouvrant vers la reconstruction de la paix ont été ouvertes. Mais, rien ne garantit le retour à la stabilité. L’ONU a pris du retard pour agir en laissant d’autres acteurs politiques tenter leur chance.

Le Soudan connu pour ses terres fertiles et ses eaux abondantes vie une situation humanitaire alarmante à cause de la famine, qui a touché gravement les camps de personnes déplacées. 26% de personnes de plus, concernées par l’insécurité alimentaire[1] au cours de la période de juin à septembre, par rapport à la même période de l’année dernière, avoisinant ainsi, 25,6 millions de personnes classées en crise. Pourtant la guerre fratricide continue d’appauvrir le pays et détruire son infrastructure.  

Cet article rappelle les causes géopolitiques des tensions graves au Soudan du Nord et met en exergue les nouvelles options choisies ou imposées pour le retour au calme. 

La géopolitique des mines est la cause des concurrences

Plusieurs puissances régionales et internationales se confrontent par guerre de délégation et soutiennent l’un des acteurs pour s’accaparer le maximum des richesses soudanaises. Ce conflit qui a déjà coûté la division du Soudan en deux Etats pourrait concerner la région dans un proche futur le Darfour. 

Cette région a des frontières avec le Tchad et la Libye. Tous les trois concernés par les tensions demeurent une source humaine importante pour le recrutement des combattants qui constituent les groupes armés qui à leur tour bénéficient largement des rentes l’exploitation de l’or, artisanale et semi-artisanale. Ces entités militaires ont aussi des armes qui circulaient lors de la guerre du Sud contre le Nord du Soudan et en gros lors de l’implosion de la Libye voisine. En plein conflit, l’or du Darfour continue de circuler clandestinement entre le Soudan du Nord et la Libye et le reste du gisements du Nord et de l’Est se vend en contrebande en Égypte et en Arabie Saoudite.

Auparavant, le Soudan a perdu avec la création du Soudan du Sud près de la majorité de ses sites pétroliers qui permettait au pays vers les années 2000 d’avoir un portefeuille important et économie pétrolière vitale. Par la suite, à l’instar de plusieurs pays africains, la coopération sino-soudanaise, par manque de liquidité, se fait souvent en ayant recours aux trocs commerciaux, basés sur les autorisations de prospection et d’exploitation minière contre la construction des infrastructures ou l’achat de l’armement destiné à soutenir l’effort de guerre. 

Dans un souci de centraliser le commerce de l’or L’Etat du Soudan du Nord, a basé principalement ses efforts sur le contrôle de l’activité minière de façon à bénéficier de ses rentes par la taxation et le renforcement de la surveillance des frontières pour arrêter les vendeurs clandestins. Les responsables soudanais ont profité du forum pour discuter les moyens susceptibles du retour de la société chinoise « Norinco Mining Company » au Soudan, sachant que l’entreprise, devrait produire entre 6 et 7 tonnes d’or par an. Le forum a été l’occasion pour les soudanais, de signer un grand accord concernant la production de l’électricité avec la compagnie chinoise China Machinery Engineering Corporation. Cette initiative énergétique pourrait rénover les installations détruites par la guerre, assurera la distribution aux ménages  et facilitera le démarrage des industries de transformation.

Les tentatives désespérées des autorités locales et de l’ONU

Autre que les accords de Djeddah et la réunion de Genève, le gouvernement a misé sur le forum Chine-Afrique et parallèlement l’ONU a son propre pouvoir du verbe.

Les espoirs du Soudan du Nord au Forum Chine-Afrique

Dans l’espoir de chercher des partenaires locaux et internationaux, pour la reconstruction de la paix et de faire face aux fissures sociales crées par la géopolitique de l’or, le lieutenant-général Abdel Fattah Al-Burhan a misé sur son voyage afin de participer au Forum Chine-Afrique. Car les tentatives de Djedda et de Genève n’ont pas encore donné de visibilité diplomatique. Par ailleurs, l’ONU n’a pas tardé de réagir pour maintenir la paix.       

A l’instar de la république démocratique du Congo et d’autres Etats déchirés par les conflits, le Soudan du Nord a choisi, le 05 septembre 2024, d’être représenté par son premier chef. C’est une opportunité pour chercher le soutien chinois pour la reconstruction de la paix, l’achat des matériels majeurs militaires et la rencontre avec les Chefs d’Etats africains qui doivent le soutenir en vue de parvenir à la paix et à la stabilité, et reconsidérer le gel de son adhésion à l’Union africaine.            

Le slogan du quatrième sommet du Forum Chine-Afrique de coopération sino-africain,[2] « Unir nos forces pour la modernisation et la construction d’une communauté afro-chinoise de destin », le lieutenant-général Abdel Fattah Al-Burhan a déclaré que le Forum avait obtenu des


[1] Pour plus de détails lire : Journal Mountada Assoudane du 06 septembre 2024.

résultats tangibles. Car la Chine a honoré ses engagements, en ce qui concerne son apport dans le cadre du changement de la facette du continent africain, loin des diktats, et des   ingérences, dans les affaires intérieures. Le discours montre bien que la Chine est concernée par la non-ingérence politique dans les affaires internes des pays, dans un monde plein de variables, de tensions de risques politiques.

Le Chef de l’Etat soudanais est venu demander l’aide à la Chine contre son rival soutenu par des puissances régionales et internationales et défend la nécessité de le classer dans la catégorie des groupes terroristes à éradiquer. Il le considère impliqué dans les crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Dans ce sillage, plusieurs Etats du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest ont préféré la même narration des responsables africains qui défendent le fait qu’il existe des restrictions au développement mérité et légitime de leurs pays. C’est un point positif souvent cité par les responsables africains qui ont préféré tendre la main à la Chine que de le faire avec des pays qui exigent des normes démocratiques non adaptables à l’environnement africain. La majorité des Etats africains ont adhéré à l’Initiative de la Route de la Soie, lancée par le Président Xi Jinping en octobre 2013, est qualifiée par les africains comme d’importantes dans l’histoire de la Chine et de l’humanité, vue la nouveauté du modèle de coopération internationale.

Les recommandations de l’ONU

En parallèle à ce partenariat stratégique, les rivaux au Soudan ont été cités par les enquêteurs[3] de l’ONU selon des niveaux, pour violation des   droits de l’homme et non-respect du droit de la guerre. Ces violations selon la même source sont qualifiées de crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Cela suppose d’imposer un embargo sur les armes et l’envoi le plus tôt possible d’une mission de maintien de la paix pour protéger les populations civiles.

En effet, les autorités du Soudan du Nord peuvent demander des demandes de dérogation à l’embargo sur les armes. Néanmoins elles peuvent le faire sous tutelle de la Mission permanente du Soudan auprès de l’Organisation des Nations Unies. Ces dérogations sont divisées en deux catégories.

La première dépend de l’examen du Comité qui est seul habilité à autoriser les mouvements de matériels et fournitures militaires au Darfour par le Gouvernement soudanais. Sinon tout déplacement sans consentement sera considéré comme violation de la législation internationale en la matière[4].

La seconde est considérée permanente[5].Elle concerne la logistique et la préparation opérationnelle liée à la mission d’observation, de vérification ou de soutien à la paix par l’ONU ou d’autres organisations régionales. Ce volet est limité au matériel majeur utilisé pour un usage humanitaire, au respect des droits de l’homme, à la protection, des civiles et à l’instruction (de vêtements de protection, les gilets pare-balles et les casques militaires…).

En somme, épargné de la géopolitique religieuse, grâce au courant malikite et les écoles soufies, proliférées dans le long temps par les dynasties marocaines, le Soudan n’a pas échappé aux séquelles de la géopolitique des frontières causés par sa richesse ethnique, qui a été à l’origine de sa division et à la géopolitique minière qui a donné lieu aux concurrences des puissances régionales et internationales. Une ligne de démarcation gardée par les casques bleus ou les forces amies africaines pourrait diminuer les accrochages entre antagonistes.  L’ONU pourrait  soutenir les populations, mais pourra-t-elle combler ce qui a été tardé par les accords de Djeddah et Genève pour réconcilier les antagonistes sinon rester longtemps en tant qu’observateur ?   

 

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[1] Visiter ONU Info https://news.un.org/fr/story/2024/09/1148461?utm_source=UN+News+-+French&utm_campaign=167fec6dc7-EMAIL_CAMPAIGN_2024_09_06_12_03&utm_medium=email&utm_term=0_0264da9d8f-167fec6dc7-%5BLIST_EMAIL_ID%5D

[2] Pour plus de détails lire : Journal Mountada Assoudane du 06 septembre 2024.

[3] Le vendredi 6 septembre 2024, une commission d’enquêteurs indépendants désignés par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, ont demandé un embargo sur les armes et le déploiement rapide d’une force de maintien de la paix pour protéger les populations civiles. 

Lire  https://news.un.org/feed/view/fr/story/2024/09/1148466 visité le 06 -9-2024.

[4] Lire :  https://main.un.org/securitycouncil/fr/sanctions/1591/exemptions/arms-embargo 1. Dérogations à l’embargo sur les armes soumises à l’examen du Comité :

Aux termes du paragraphe 3 a) v) de la résolution 1591 du Conseil de sécurité, le Comité est chargé d’examiner et d’approuver, toutes les fois qu’il l’estime approprié, les mouvements de matériels et fournitures militaires au Darfour par le Gouvernement soudanais, conformément au paragraphe 7 de la résolution 1591 (2005), précisé et mis à jour au paragraphe 8 de la résolution 1945 (2010) et au paragraphe 4 de la résolution 2035 (2012).

[5] Idem 2. Dérogations permanentes à l’embargo sur les armes

Aux termes du paragraphe 9 de la résolution 1556 (2004), l’embargo sur les armes ne s’applique pas aux articles et aux destinataires suivants :

Les approvisionnements ainsi que la formation et l’aide techniques y afférentes nécessaires à des opérations d’observation, de vérification ou de soutien à la paix, y compris les opérations dirigées par des organisations régionales, qui sont menées avec l’autorisation de l’Organisation des Nations Unies ou le consentement des parties concernées ;

Les fournitures de matériel militaire non meurtrier destiné exclusivement à un usage humanitaire, à l’observation du respect des droits de l’homme ou à la protection, et la formation et l’assistance techniques y afférentes ; et

Les fournitures de vêtements de protection, y compris les gilets pare-balles et les casques militaires, destinés à l’usage personnel des fonctionnaires des Nations Unies, des observateurs des droits de l’homme, des représentants des médias, du personnel de l’aide humanitaire et de l’aide au développement et du personnel associé.