Par Mohssin DATSSI, Membre du think thank NejMaroc, Centre Marocain de Recherches sur la Globalisation.
Le Maroc et l’Égypte entretiennent depuis près de 70 ans des relations diplomatiques cordiales.
Dans un contexte de mort chronique du projet de l’Union du Maghreb Arabe (UMA) et de l’instabilité politique ambiante dans certains états de la région depuis ce que l’on peut nommer désormais le cataclysme arabe de 2011, les 2 états, forts de leurs histoires respectives et de leurs potentiels économiques, ont considérablement renforcé leur partenariat à tous les niveaux et particulièrement sur le volet économique.
Les relations bilatérales et culturelles les plus solides de l’Afrique du Nord
Le Maroc et l’Égypte ont traversé dans l’ensemble, près de 70 ans de relations sans incident diplomatique majeur, de Gamal abdel
Nacer à Abdelfattah Sissi.
Les 2 états ont œuvré activement à la création à Rabat en 1969, à l’Organisation de la Conférence Islamique , ceci après l’incendie qui avait ravagé la Mosquée El Aqsa, suivie en cela par la mise en place du Comité Al Qods, dont la présidence a été attribuée à Feu Sa Majesté le Roi Hassan II et présidée depuis par Sa Majesté le Roi Mohammed VI.
Sur le plan régional, Rabat et le Caire adoptent souvent des positions communes afin de trouver des résolutions pour mettre fin aux conflits du Moyen et du Proche Orient et dans le Monde Arabe en général.
Sur le dossier du Sahara Marocain, l’Égypte est, de tous les états de l’Afrique du Nord, la seule nation à avoir adopté une position constante en faveur de l’intégrité territoriale du Royaume.
Le positionnement du Caire sur le Sahara tranche avec l’hostilité permanente de l’Algérie, de l’antagonisme de la Libye de Muhammar Kaddafi jusqu’à la fin des années 80, et de l’attitude de plus en plus ambigüe de la Tunisie de Kaïss Sayed, qui avait accueilli officiellement le chef du groupe séparatiste du Polisario en 2022.
Les 2 États sont liés culturellement également depuis des décennies.
En effet, un bon nombre d’artistes marocains ont enregistré leurs chansons en Egypte et y même séjourné, ce fut le cas de Abdelwahab Doukkali ou encore Abdelhadi Belkhayat.
Inversement, d’illustres chanteurs égyptiens se produisaient également au Maroc régulièrement, nous pouvons citer en autres Abdelhalim Hafed ou encore la Diva de l’Orient Oum Kalthoum.
L’Égypte, à travers son industrie cinématographique et artistique, fut très présente à la télévision nationale à travers des films, des feuilletons ou encore des pièces de théâtre.
Adil Imam avait même été décoré par Feu Sa Majesté le Roi Hassan II du Wissam Alaouite en 1997.
Deux puissances régionales aux similitudes géographiques et géopolitiques
Tout comme le Royaume, le pays des Pharaons possède 2 façades maritimes.
Le Maroc est bordé par l’Ocean Atlantique à l’Ouest et la Mer Méditerranée au Nord, l’Égypte possède une façade méditerranéenne également au nord du pays et est bordée par la Mer Rouge à l’est.
Le Maroc est riverain du Détroit de Gibraltar, endroit qui connait l’un des trafics maritimes les plus denses de la planète tandis que l’Égypte dispose du Canal de Suez, liant Port Saïd en Méditerranée à Suez en Mer Rouge, constituant ainsi un point de passage vital pour le pays pour ses échanges commerciaux, notamment avec les pays du Golfe Persique et le continent asiatique.
Des similitudes également sur le plan régional et géopolitique :
Tout comme le Maroc avec l’Algerie, l’Égypte a eu des relations souvent tendues avec son voisin libyen, la guerre égypto-libyenne de juillet 1977 est un exemple des crispations existantes entre ces 2 états voisins.
Sans pour autant être conflictuelles aujourd’hui, la moindre tension peut raviver les velléités.
Le pays des Pharaons doit également faire face à un contexte régional instable: crise libyenne , conflits au Proche et Moyen Orient et guerre civile au Soudan , un autre pays voisin.
Pour développer son économie, Le Caire n’a pas d’autre alternatives que de s’ouvrir un peu plus au monde et notamment à l’Asie .
Deux États complémentaires ,
Le Maroc et l’Égypte ont un objectif commun : devenir des hubs mondiaux tout en restant connectés au continent africain .
La robustesse des relations bilatérales prend systématiquement le pas sur les tensions éphémères, ce fut le cas lors du litige commercial lié à l’accord de libre échange liant les 2 états.
Au lieu de choisir l’affrontement, on privilégie le dialogue constructif, le Maroc et l’Égypte ont pris conscience de la nécessité de jeter les bases d’un partenariat stratégique de haut plan, particulièrement dans le contexte géopolitique régional actuel.
Un partenariat basé sur le principe du gagnant-gagnant se dégage alors progressivement.
Chaque partie a compris l’intérêt de profiter équitablement des atouts de l’autre.
Plusieurs consultations s’organisent et le Forum d’affaires Maroc-Égypte qui s’est tenu au Caire du 3 au 5 mai est la consécration d’une volonté commune d’avancer ensemble sur des principes sains et novateurs .
Les investisseurs marocains , tout comme leurs confrères égyptiens pourront désormais, en toute sérénité entrevoir les opportunités à exploiter.
Éloignés géographiquement , le Maroc et l’Égypte sont entrain de consolider durablement leur partenariat stratégique.
À défaut d’entretenir de bonnes relations avec leurs voisins directs, les 2 îles de l’Afrique du Nord ,de par leur histoire, leurs similitudes et surtout leur complémentarité , constitueront sans nul doute à moyen terme, un partenariat d’exception dans la zone sud.
