Notre objectif dans cet article est d’étudier la place qu’occupe des institutions centrales dans la structure politico-historique du Maroc dans ses relations internationales. Ces institutions constituent l’ossature de la légitimité du régime politique au Maroc : l’Imarate al Mouminine et son corollaire la Bayaâ. Cela nous permettra de bien déceler les facteurs profonds des relations internationales et de la politique étrangère du Maroc. Comment le Royaume a ainsi projeté et utilisé les spécificités de sa structure politique et les leviers de son identité historique afin de mener sa politique étrangère et gérer les contraintes liées à son positionnement géostratégique. Il s’agit d’une illustration parfaite de l’interaction entre la politique interne et politique extérieure.
On évoque ici principalement la Bayaâ, on évoque également l’externalisation du champ religieux dont elle est une composante essentielle. A ce niveau, on remarque une évolution dans la fonction du champ religieux. Il est passé d’un outil de légitimation à un moyen de rayonnement international et géostratégique faisant partie d’une stratégie bien définie.
Cette évolution reflète in extenso le changement dans la continuité qui caractérise l’histoire moderne du Royaume. Les assises du pouvoir jouent toujours leurs rôles, ils sont néanmoins adaptés aux exigences de la modernité et des ambitions légitimes du Royaume : Feu Hassan II avait pour objectif d’asseoir les bases de l’Etat-nation en renforçant la légitimité du régime aussi bien sur le plan interne qu’international. le Roi Mohammed VI affiche l’ambition de modernisation des institutions et du développement et l’émergence économique et social.
Ainsi, on est passé de la Bayaâ comme outil de légitimation lié notamment à la capacité de la Monarchie à se mobiliser et mobiliser la nation autour de l’intégrité territoriale et une certaine identité singulière du Royaume dans son environnement, à la Bayaâ et in extenso le fondement religieux en tant que facteur déterminant dans les nouvelles stratégies diplomatiques et géostratégiques du Royaume .
1 La Bayaâ : outil de légitimation
1.1 contexte politique
Dans le contexte des luttes politiques au Maroc durant les premières années de l’indépendance, la Monarchie marocaine avait fait le choix de suivre une politique de re-traditionnalisation. Cette politique visait notamment la réaffirmation de la suprématie de l’institution monarchique face aux autres centres de pouvoir naissant (mouvement national, gauche, armée…). Le champ historique et religieux a été redéfini, aussi bien du point de vue institutionnel que du point de vue normatif. Ce redéploiement poursuivait deux objectifs liés entre eux.
Ce choix s’expliquait ainsi par des facteurs externes. Le besoin pour l’Etat nouvellement indépendant de s’affirmer dans un monde qui se caractérisait par une bipolarisation à caractère foncièrement géostratégique et idéologique. Par déterminisme, en raison notamment de la nature de son régime politique le Maroc ne pouvait que choisir une ligne politique spécifique axée sur les éléments suivants :
- Le refus des idéologies totalitaires qui risquent de bouleverser les structures traditionnelles. Il s’agit ici notamment du communisme et du socialisme.
- Tout en acceptant un système économique libéral, le nouvel Etat indépendant restait jaloux de ses prérogatives ne voulant pas retomber sous une domination étrangère même indirecte. Le Maroc a suivi ainsi une politique teintée de souverainisme aigu.
Une des facettes de ce choix fut à un certain moment l’initiative prise par Feu Hassan II de s’associer à l’Arabie saoudite et l’Iran pour la création de l’organisation de la Conférence islamique vers la fin de septembre 1969 à Rabat . Il s’agissait d’une tentative de remettre le facteur religieux comme un levier idéologique capable de faire face au socialisme. C’est même dans ce cadre que le Royaume a toujours voulu jouer un rôle de leadership dans le monde : présidence du Comité Al Qods, siège de l’ISESCO à Rabat….
Sur le plan interne, il était clair au lendemain de l’indépendance qu’une lutte pour le pouvoir s’était engagée entre les forces issues du mouvement national d’un côté et la Monarchie et certaines forces qui lui sont affiliées de l’autre. Cette dernière a fait le choix d’avancer un de ces atouts stratégiques afin de consolider son pouvoir dans un pays qui portait toujours les ingrédients de la fragmentation et qui avait besoin d’une force unificatrice capable d’engager le pays dans la finalisation de l’édifice de l’Etat-nation.
Ainsi, le registre religieux a été investit notamment à travers la constitution. L’institution de Imarate al Mouminie a été constitutionnalisée et a passé d’une autorité califale à essence divine à une institution organisée et intégré dans un cadre normatif supérieur. Cette institution devient ainsi le levier principal de la légitimité de la Monarchie qui se voit investie de la fonction de garante de l’intégrité territoriale et de la pérennité de l’Etat.
Cette fonctionnalisation du champ religieux équivaut à une refondation et non pas à une création de toute pièce. Bien entendu, l’Imarate al Mouminie et le concept de la Bayaâ n’ont pas été introduit dans le contexte postcolonial. Ils ont toujours constitué des fondements du pouvoir politique au Maroc. Ils ont cependant été réinvestis et redéployés dans le cadre d’un système politique modernisé et constitutionnalisé.
1.2 Intégrité territoriale
Ainsi, durant les premières années de l’indépendance, le Maroc, au-delà des luttes purement politiques, faisait face à un prolongement de blad siba dans certaines régions. Des centres de pouvoir affiliés aux autorités du protectorat risquaient de vouloir affaiblir l’emprise du Roi sur certaines régions. Plus de la moitié du territoire authentique du Royaume restait entre les mains des colonisateurs.
Allal Fassi et le parti de l’Istiqlal avait invoqué le « Al Maghrib Al kabir » afin de revendiquer le rétablissement des frontières historiques du Maroc, incluant même le Chenguit (actuelle Mauritanie ). Au-delà du caractère nationaliste de cette démarche ; il s’agissait objectivement d’un facteur de pression politique sur la Monarchie. Cette dernière ne pouvait se laisser distancer par le parti de l’Istiqlal sur ce terrain à un moment où le Royaume n’était encore pas doté d’une constitution en bonne et due forme organisant et consacrant les pouvoirs de la Monarchie. Feu Mohammed V n’a pas ainsi tardé de revendiquer officiellement ces territoires et s’opposer à la constitution d’un Etat indépendant en Mauritanie.
Un bon nombre de dignitaires mauritaniens avaient réagit à la volonté française en faisant allégeance au Sultan. Le Maroc avait rappelé les liens de Bayaâ qui liaient les tribus mauritaniens aux sultans marocains à travers l’histoire.
La revendication de territoires historiques trouvait son assise dans une sorte de jonction conceptuelle faite entre le passé et le présent. Une sorte de continuité historique devrait être mise en avant afin d’étayer les droits historiques du Maroc. Or, l’invocation de la Bayaâ et de l’Imarate al Mouminine remplissait cette fonction de manière pertinente.
On retrouve cette politique plus loin dans la revendication marocaine du territoire du Sahara (Saguiet Hamra et Rio de Oro). Le dossier marocain devant l’ONU et plus précisément à la Cour internationale de Justice a été basé sur les titres juridiques nés des droits historiques.
Afin de faire face à l’essor du principe du droit des peuples à l’autodétermination, le Maroc va se baser sur la notion de possesseur immémoriale pour établir la solidarité de destin entre les hommes qui se répartissent du Rif à la région du Cap Blanc et leur acceptation commune d’une même souveraineté, celle du Sultan. Cette acceptation prenait plus précisément la forme juridique de Bayaâ.
Les actes internes présentés par le Maroc devant la CIJ concernaient notamment des dahirs de nomination de caïds locaux, ou des manifestations d’allégeance de caïds sahariens envers le sultan. L’Espagne va contester ces preuves, en affirmant qu’elles ne concernaient que les tribus Teknas sédentaires du « sud marocain », et non pas les « Teknas libres » nomadisant au Sahara dit espagnol. L’Espagne va également réfuter l’allégeance de Ma Alaïnin au sultan chérifien, en affirmant qu’il s’agissait plutôt d’alliance. Ainsi, les actes d’allégeance s’étaient transformés en véritables atouts entre les mains du Maroc que ses adversaires essayaient de pourfendre.
Le problème qui se posait ici pour le Maroc résidait dans cette identité entre le lien d’allégeance au sultan et le caractère marocain d’une tribu. Un groupement humain ne pouvait se considérer comme marocain, s’il n’avait pas fait allégeance au sultan. Le lien d’allégeance était donc tout comme la structure particulière de l’Etat marocain, comme une arme à double tranchant pour le Maroc dans cette affaire. D’ailleurs la Cour, tout en se rangeant derrière la position espagnole pour réfuter les actes internes présentés par le Maroc, observa que les liens juridiques d’allégeance ne se confondaient pas avec la souveraineté : «Cette allégeance doit être incontestablement effective et se manifester par des actes témoignant de l’acceptation de l’autorité du souverain »
La Cour arrive à la conclusion que les documents présentés par le Maroc n’établissent pas l’exercice d’une souveraineté effective dans la région, mais seulement l’exercice d’une certaine autorité ou influence du sultan sur certaines tribus du Sahara. Il n’y avait par conséquent, toujours selon la Cour, aucun lien de souveraineté territoriale entre le Sahara et le Maroc, mais il existait des liens juridiques d’allégeance entre « le sultan et certaines, mais certaines seulement, des tribus du Sahara … ».
Cette conclusion va soulever des critiques allant émanant de certains juges. C’est ainsi, que le juge AMMOUN n’était pas d’accord avec la Cour quand elle a distingué entre les liens de souveraineté territoriale et les liens d’allégeance personnelle. Le juge AMMOUN décela ainsi, à notre avis, une certaine incohérence dans le raisonnement de la Cour. Celle-ci avait reconnu auparavant que : « les liens juridiques existent normalement par rapport à des personnes ». Or, elle avait en même temps, affirmé que les liens juridiques qui doivent être reconnus ici sont ceux qui peuvent influer sur le processus de décolonisation. On ne pouvait que déduire que les liens personnels pouvaient également influer sur ce processus.
Pour AMMOUN, l’allégeance était «de caractère politique et constitutionnel» équivalant à un lien de souveraineté.
Le juge ivoirien BONI, estima que la Cour, en niant l’existence de liens de souveraineté, « n’a pas suffisamment tenu compte du contexte local ».
La procédure devant la CIJ a mis au grand jour les tares du droit international classique basé sur une conception européenne de la souveraineté, ignorant les différentes autres conceptions.
Tout le débat était autour de l’allégeance à caractère personnelle et tribale comme constitutive ou non d’un titre de souveraineté. Or, en Europe, l’Etat s’est conçu à travers un lien d’effectivité avec un territoire, abstraction faite des autres considérations. Dans la conception marocaine, l’allégeance personnelle qui était à la base de son système juridique et politique précolonial devrait être prise en compte comme instaurant des liens juridiques de souveraineté.
La réponse de la Cour a été rigide, ne reconnaissant pas l’existence de systèmes juridiques autres qu’occidentaux qui établissent des liens juridiques entre un Etat et un territoire donné.
Par la suite, le pouvoir politique marocain a décidé de ne retenir de l’avis consultatif que la reconnaissance du lien juridique entre le Royaume du Maroc et les habitants du Sahara. La conclusion de la Cour sur l’inexistence de liens de souveraineté a été ignorée sciemment par pas le Maroc qui maintint ainsi son attachement à sa propre conception de la souveraineté et en insistant à en faire le fondement de sa récupération du territoire. Les événements postérieurs ont confirmé cette tendance : conclusion de l’accord de Madrid, la réunion de la Djemaa, la réintégration de Oued Dahab qui était entre les mains de la Mauritanie à travers la bayaâ des tribus de la région au Roi Feu Hassan II….
Particulièrement, la Marche verte a constitué une réelle illustration de ce volontarisme marocain. Elle trouvait son essence et sa source dans la nécessité de renouvellement de l’allégeance entre le Sultan et les habitants du Sahara. Comme l’avait évoqué Khadija Mohsen Finan, la Marche empruntait au procédé de harka, une expédition qui, dans ce cas n’était pas punitive, mais visant à faciliter le renouvellement de la Bayaâ.
1.3 Positionnement géostratégique
Au-delà de la question de l’intégrité territoriale, le Royaume du Maroc a utilisé les fondements religieux de son pouvoir politique dans un but de consolidation de son positionnement dans le monde arabo-musulman. Ce dernier était et est sujet et théâtre de divisions et de polarisation. La position géographique périphérique du Maroc par rapport à cette zone l’a poussé à mieux réinventer ses atouts afin de compenser cette situation géographique plutôt défavorable. Ainsi, le lignage de la dynastie alaouite (le chérifisme), l’existence de l’institution de l’Imarate al Mouminine basé sur la Bayaâ ont été mis en avant, notamment par Feu Hassan II. Il s’agissait doublement d’un outil de légitimation d’une singularité au sein du monde musulman et un outil stratégique de positionnement .
Ainsi, en s’adressant aux chefs des Etats islamiques à l’occasion du début du XVème siècle de l’Hégire, Feu Hassan II avait choisi de rappeler ce lignage des Rois Alaouites qui ont été investis de la mission de la défense de l’Islam.[1]
Comme l’a rappelé Mohammed Tozy, cette dimension « khalifienne » du pouvoir interpelle de manière directe une reconnaissance du leadership religieux au niveau du monde musulman[2]
La Bayaâ a pris de ce fait sa place en tant que fondement de l’exercice du pouvoir politique au Maroc lui permettant d’afficher ses spécificités historiques sur le théâtre des relations internationales et du droit international. Il s’agissait de ce fait d’un outil de légitimation fort et multiforme.
Ainsi, cette spécificité du pouvoir politique marocain, s’est avérée comme un handicap au niveau du droit international dominé par la conception européenne de l’Etat et de la souveraineté territoriale. En revanche, elle s’est avérée être un véritable atout au niveau du positionnement géostratégique du Royaume.
2 La Bayaâ, outil stratégique : externalisation du champ religieux
2.1 Evolution politique
Le Maroc a connu une évolution politique intéressante durant les trente dernières années. Cette évolution s’est accélérée depuis l’arrivée au pouvoir de SM Le Roi Mohammed VI. On est entré, petit à petit dans de nouveaux paradigmes politiques, sans toutefois abandonner les fondements du pouvoir.
Les nouvelles configurations universelles, l’évolution des relations internationales et des pratiques diplomatiques ont poussé le Royaume à réadapter sa doctrine diplomatique et sa politique étrangère. Les nouveaux paradigmes structurants de la politique étrangère marocaine sont le pragmatisme et la place du citoyen au centre des politiques publiques.
Certes, la Bayaâ Imarate al Mouminine continue de jouer le rôle d’élément constituant du pouvoir politique. L’accession au trône de SM Roi Mohammed VI n’a pas dérogé à la règle ancestrale de l’acte d’allégeance qui a été conclu par les hauts dignitaires du Royaume représentant les différentes institutions et différentes régions du Royaume. Cet acte est renouvelé tous les ans à travers la cérémonie d’allégeance.
Cependant, et contrairement à Feu Hassan II qui concevait le champ traditionnel et religieux comme unique source de légitimité, Mohammed VI tend plutôt à moderniser son pouvoir en priorisant un pragmatisme volontariste.
Le Roi a à maintes reprises manifesté sa volonté de faire de la politique étrangère un levier de développement économique et humain. Ceci passe essentiellement par l’édification d’un certain leadership économique et stratégique dans son environnement régional et continental.
L’investissement du champ religieux en tant que levier stratégique de la politique étrangère marocaine s’est fait dans une double direction.
2.2 Levier de la politique africaine du Maroc
Ainsi, une stratégie est mise en place se focalisant notamment sur le continent africain. Le Maroc suit ainsi une politique de pénétration progressive par étapes passant du bilatéral (accords stratégiques avec des pays comme le Sénégal, le Gabon et la Côte d’Ivoire…) au régional (accords avec la CEDEAO et la CEMAC) au multilatéral (Demande de retour à l’Union Africaine). L’Etat a choisi de raffermir les assises de sa présence dans le continent préalablement.
C’est dans ce cadre, que le Maroc fait appel à ses atouts liés au champ religieux :
Ainsi, a chaque visite de SM le Roi en Afrique, le statut d’Amir al Mouminine est investi de manière à rappeler la profondeur historique de la présence marocaine en Afrique. Le champ religieux est ainsi une partie importance du dispositif de coopération engagé.
L’objectif également d’exporter le modèle marocain en matière de gestion du champ religieux dans la région qui constitue un prolongement géopolitique naturel du Royaume. L’objectif est de consolider un certain leadership spirituel du Royaume.
Le Maroc poursuit ces objectifs par le moyen notamment de la formation des imams issus de pays d’Afrique de l’ouest au début de l’étendre à d’autres régions du continent et du monde.
L’un des points les plus saillants de cette stratégie d’influence fut la création par le Souverain en 2016 de la Fondation des Oulémas africains. Cette institution basée à Rabat et financée par des fonds exclusivement marocains regroupe des Oulémas provenant de 31 pays africains. L’objectif assigné à cette institution est la concertation entre les théologiens des différents afin de favoriser l’essor d’un Islam tolérant face à la montée du radicalisme et du djihadisme.
Le Maroc a procédé également à la construction de plusieurs mosquées en Afrique consacrant une tradition suivie par Feu Hassan II. Les communautés musulmanes des pays africains sont ainsi partiellement prises en charge par Amir Mouminine en ce qui concerne l’exercice de leurs cultes.
A titre d’illustration, SM Le Roi Mohammed VI a procédé au mois d’octobre 2016 à l’inauguration d’une grande mosquée pouvant abriter 5000 fidèles à dar Essalam en Tanzanie. Selon le communiqué du Cabinet Royal, cette initiative intervient en réponse à la demande formulée par le Mufti Aboubakr Ben Zoubeir Ben Ali, président du Conseil national des musulmans de Tanzanie, exprimant le besoin pressant pour cette mosquée et ses dépendances dans la ville de Dar es Salam.
Cet appel adressé par les représentants des communautés musulmanes en Afrique au Roi Amir Al Mouminine puise dans une tradition ancestrale. En effet, différents zaouias et tribus musulmanes situées au sud du Sahara faisaient régulièrement allégeance aux sultans du Maroc. Cette allégeance se limitait aux affaires de culte et au leadership religieux. Elle n’empiétait pas sur les structures politiques locales.
Les prolongements des zaouias en Afrique de l’ouest consolidaient également l’autorité spirituelle des sultans et l’influence religieuse du Royaume chérifien.
Ce fond historique est ainsi consolidé et utilisé en tant qu’élément stratégique d’influence. Il tend à jouer le rôle de cadre politique et stratégique de la nouvelle politique africaine du Royaume.
L’adversaire immédiat du Maroc à savoir l’Algérie a pris conscience des atouts utilisés par le Maroc. Ainsi, le pouvoir algérien a entrepris à contrer cette stratégie marocaine. Plusieurs leviers ont été activés dans ce sens. La dimension confrérique est à la tête de ses actions. Ainsi, certaines fractions de la puissante zaouia Tijania ont été approchées dans ce cadre….
2.3 La communauté marocaine en Europe
Les fondements religieux du pouvoir politique sont appelé également à jouer un rôle dans d’autres zones stratégiques. Il en est ainsi notamment en Europe de l’ouest. En effet, cette région se distingue par la présence d’une communauté marocaine importante. Il s’agit d’un facteur politique significatif , qui fait partie des déterminants des politiques publiques.
Les règles de la nationalité au Maroc se basent essentiellement sur le concept de la Bayaâ qui définit le lien entre le Roi et ses sujets. Ce lien est de ce fait imprescriptible. L’acquisition d’une autre nationalité ne porte ainsi nullement atteinte à la validité de ce lien. De ce fait, les marocains résidents à l’étranger même de troisième génération gardent automatiquement leur nationalité.
En invoquant ce titre, le Maroc s’implique de plus en plus dans la gestion du culte musulman notamment en France et en Belgique. Ces deux pays ont à maintes reprises pris acte de ce rôle. Ils ont même appelé le Royaume à jouer un rôle d’encadrement religieux à travers les imams marocains envoyés sur place. La gestion du champ religieux au Maroc est sujet d’intérêt de ces pays qui y voient un modèle du genre.
On se pose néanmoins la question sur l’impact que pourrait avoir les attentats de 2015 et 2016 en France et en Belgique sur cette attractivité et cette implication.
En effet, le climat d’insécurité né des attentats a amplifié notoirement le besoin en coopération sécuritaire avec le Maroc. Cette coopération s’est accélérée et les Etats demandeurs affichent souvent leur satisfaction. Néanmoins, le malaise social et politique amène ces Etats à davantage de verrouillage de la gestion l’Islam. L’exercice du culte se pose désormais en termes problématiques et purement sécuritaires. L’essor de l’islamophobie risquant de favoriser l’extrême droite amène ces Etats à limiter au maximum les implications des Etats d’origine des immigrés dans les politiques de culte. Certes, le Maroc garde une bonne image dans ce domaine en raison du statut du Commandeur des Croyants qui permet de prévenir les abus et les tendances radicalisées. Cependant, il est clair que le Royaume se devra d’adapter ses orientations vu les nouvelles contraintes.
[1] Voir Hind Arroub ; Les assises du pouvoir monarchique au Maroc , http://www.aljazeera.net/knowledgegate/opinions/2004/10/3/%D9%85%D8%AA%D9%83%D8%A2%D8%AA-%D8%A7%D9%84%D8%AD%D9%83%D9%85-%D8%A7%D9%84%D9%85%D9%84%D9%83%D9%8A-%D9%81%D9%8A-%D8%A7%D9%84%D9%85%D8%BA%D8%B1%D8%A8
:(إنمنسنناللهفيخلقهورحمتهأنبعثفيهمسيدنامحمداصلواتاللهعليهبرسالةإلاهيةهيخاتمةالرسالاتتهديهمإلىمحجةالصواب…،واقتضتحكمتهأنيضععلىعاتقخلفاءالمسلمينوأمرائهمأمانةخلافتهفيالأرض…،وقدامتازالمغربالإسلاميبتعاقبملوكبررةجعلواالحفاظعلىالإسلاموالدفاععنهمهمتهالأولى..،ومنبينهمملوكشرفاءمنآلالبيت،فيطليعتهاأسلافناالملوكالعلويينالمنعمينفيدارالإسلام…).
[2]Mohammed Tozy, Le Roi, commandeur des Croyants, in, Driss Basri et autres, Edification d’un Etat moderne, Paris, Albin Michel 1986
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HANAFI ZAKARIA Docteur en relations internationales, conférencier et expert en géopolitique et sécurité de défense.