Malgré les dénonciations de la communauté internationale, la   Russie reste sourde à toute provocation et continue ses opérations militaires, même lentement, pour parvenir à la réalisation de ses objectifs stratégiques. Pour la première fois, les calculs concernant la bonne marche de l’économie mondiale n’ont pas donné leurs fruits escomptés et les sanctions aussi sévères soient-elles n’ont fait qu’aggraver la crise. Chacun des antagonistes dépendait l’un de l’autre à des degrés variables. Apparemment, ce sont les Etats occidentaux et leurs alliés qui dépendent beaucoup plus des importations russes, notamment le gaz qu’ils ne sont pas prêts de sacrifier et d’autres matières stratégiques. La majorité de la communauté internationale a condamné l’usage à la force et en même temps un grand nombre d’Etats n’ont pas appliqué le régime des sanctions. Sinon qui va les endommager sur leurs pertes économiques ?

 Dans cette brève analyse géopolitique bien que sommaire, il sera fait appel, à la logique idéologique de guerre froide d’un monde bipolaire de retour, qui a prévalu au lendemain du second conflit mondial en matière d’encerclement de puissance, afin d’expliquer la relation étroite entre la campagne russe et son inattendue imposition géoéconomique sur le commerce international.

Encerclement et contre encerclement : un retour à la guerre froide

A l’instar de l’encerclement effectué face à la Chine au Pacifique et en mer de Chine méridionale, ou face à l’Iran au Golfe arabo-perse, celui que le Kremlin veut contrecarrer a débuté depuis la fin du XXème siècle lorsque la faible Russie de l’époque n’a pu l’empêcher. La Russie continue de défendre le fait qu’il n’existe pas de « pacta sunt servanda »[1] de la part des EUA et ses alliés.

Elle a non seulement hérité un lourd fardeau de l’Empire Soviétique mais devait planifier, pas à pas, la modification des tracés frontaliers. La Russie longtemps considérée puissance de l’Eurasie région considérée « pivot du monde », n’avait pas de choix diplomatique et devait agir sur le voisinage afin d’encourager le séparatisme russophone ou slave (l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie – régions que revendique la Géorgie en 2008, la Crimée en 2014 et le Donbass de l’Ukraine en 2022) et récupérer les territoires qu’elle juge faisant partie de sa souveraineté. 

 En effet en Europe, ledit encerclement a été inauguré vers la fin des années quatre-vingt-dix, par la Pologne, qui a été longtemps divisée entre les empires austro-hongrois, ottoman et prussien, puis dans le cadre du partage de zones d’influence elle faisait partie de l’ex URSS. Ainsi, elle a décidé, à partir de 1999, de changer d’alliance de défense par son adhésion à l’OTAN en modifiant radicalement son dispositif militaire par la rénovation de ses composantes terrestre et aérienne selon les normes occidentales.

Elle a ainsi ouvert la porte à la Tchéquie, la Hongrie, les trois républiques baltes considérées maillons faibles de l’Europe du Nord, la Roumanie, la Slovénie puis l’Albanie et la Croatie. La Russie déclare agir dans un cadre de contre encerclement et la Chine épouse en entier sa stratégie, car elle aussi s’est sentie menacée par le même phénomène.

Plus tard, au nom de la lutte contre le terrorisme, des missiles ont été installés en Europe de l’Est pour faire face à toute attaque balistique de la Corée du Nord ou de l’Iran. Mais ces missiles sont devenus braqués sur ses territoires. Pour le même motif, à des fins logistiques dans leur guerre contre l’Afghanistan, les EUA ont acquis des bases militaires non loin de la Russie (face à la Sibérie), au Tadjikistan, au Kirghizistan et dans l’Ouzbékistan. Ce sont aussi des territoires musulmans de l’ancien Empire Ottoman devenus républiques soviétiques. 

C’est de l’histoire ancienne, mais la Russie se sent visée et défend le fait que les EUA avaient promis de ne pas intégrer les anciennes républiques européennes de l’Est dans l’OTAN. D’ailleurs pour la Russie la campagne en Ukraine pourrait s’arrêter si l’OTAN signe un accord dans lequel le pays agressé devient une zone démilitarisée. Plus fort encore, pour le Kremlin et les géopolitologues qui croient en sa défense, l’OTAN n’a pas lieu d’être, puisque le Pacte de Varsovie a disparu avec la chute de l’URSS, face à une organisation mondiale, l’ONU qui initialement au vu de sa charte se doit d’assurer de la paix et la sécurité collective internationales. Donc pour lui, à cause de ses ingérences dans les Etats souverains, de ses violations du droit international, cette organisation n’est qu’une une alliance de conquête et un bras armé des occidentaux.

Dans cette lutte d’encerclement et de contre encerclement, il parait probable que l’exemple des partages de l’Allemagne et de la Corée en deux entités distinctes, par les deux pôles rivaux est en cours de réalisation en Ukraine. Les dernières opérations militaires russes orientées beaucoup plus vers l’Est constituent un indice parmi d’autres pour créer un nouveau mur autour du fleuve Dniepr qui sépare l’Est et l’Ouest de l’Ukraine. D’ailleurs les russes, considérés héritiers de l’Empire Byzantin et son église orthodoxe seront mieux accueillis à l’Est qu’à l’Ouest dont les populations sont des chrétiens. 

Contradiction du discours politique au niveau planétaire

Dans la continuité du double langage, les déclarations des responsables politiques et ceux chargés des économies nationales, sont contradictoires. Des dénonciations très timides de plusieurs pays, mais sans respect des sanctions prononcées par le pôle occidental. L’intérêt urgent des uns et des autres dépasse de loin l’application de la panoplie de sanctions qui peuvent se retourner contre plusieurs Etats liés étroitement avec la Russie, en ce qui concerne l’importation de certaines matières stratégiques. Par pénurie de plusieurs produits, les sanctions contre la Russie pourraient se retourner contre ceux qui les appliquent. Aussi, à titre de rappel, la France qui mène des pourparlers avec la Russie et participe en même temps activement dans le régime des sanctions, se trouve coincée au mur par ses influentes sociétés transnationales qui ont investie au pays de l’Ours blanc. Il s’agit parmi d’autres, de Total Energy, la banque société générale, Renault-Nissan, Danone et la liste est longue. D’autres Etats européens connaissent le même sort. Donc fallait-il passer ces sociétés en justice comme pendant la guerre en Syrie ? N’est-il pas vrai que la cimenterie Lafarge a été citée dans le commerce avec DAECH ? Sinon, autrement dit, d’autres sociétés ont brisé les sanctions en continuant leurs relations avec L’Iran. Car, en appliquant le régime des sanctions certaines sociétés ont souvent perdu leur marché et se sont fait remplacées par d’autres.  

 Les discours prononcés par les Etats de l’Union européenne et leurs alliés dans le monde, signalent ouvertement qu’ils ne veulent pas d’affrontement direct avec la Russie, afin d’éviter une 3ème guerre mondiale. Certains Etats constituant des puissances soit militaires soit économiques, comme le Brésil, l’Inde, la Chine, la république d’Afrique du Sud, le Pakistan, le Mexique, l’Argentine, le Chili et d’autres, ne veulent pas entrer en conflit d’intérêt avec la Russie. Aussi, dans le cadre du double discours et selon l’intérêt géopolitique, l’Inde continue sa politique de flou stratégique et ses balancings de sa stratégie globale. On relève qu’elle est incluse dans le BRICS[2] et en même temps elle a un accord stratégique avec les EUA pour faire face à la Chine.

 La grande majorité des Etats africains, américains et asiatiques ne s’alignent pas dans ce conflit avec le pôle occidental, devenu isolé. Donc, malgré leur pauvreté les pays non concernés par ce conflit, choisiront le plus offrant ou vont continuer à adopter l’antilogie des discours.  Les déséquilibres internationaux sont là pour justifier l’émergence d’un nouvel ordre mondial. C’est le moment où les institutions internationales doivent être révisées, renforcées par des nouvelles législations et adaptées à un système multilatéral, évitant ainsi le monopole d’un seul acteur ou d’une poignée d’Etats. Les temps difficiles et les difficultés de la SDN au milieu des années trente, sont devenues les mêmes pour l’ONU affaiblie au début du troisième millénaire.    

Cet état de fait pourrait être lu comme une faiblesse au sein du camp occidental et d’autres Etats qui n’ont pas choisi d’accuser la Russie d’agresseur.  En même temps, ceux qui sont extrêmement contre la Russie, ont choisi le soutien logistique en encourageant l’enrôlement des contingents de volontaires, en prélevant de leurs budgets nationaux, en difficulté à cause des séquelles du COVID 19, des sommes colossales réservées aux armements de dernière technologie et à l’aide aux réfugiés ukrainiens .Ceux-ci ont choisi de fuir leur pays et  largement avantagés dans leurs déplacements en Europe par rapport aux réfugiés syriens et afghans , longtemps stoppés et humiliés dans les frontières ! Par ailleurs, ce soutien logistique ne constitue pas une guerre indirecte ? Sinon une guerre par délégation ? Est si c’était la Russie qui finançait la résistance ou le maquis dans leurs frontières ?

La réunion du Conseil de sécurité, sur la crise ukrainienne, au début du mois de mars montre bien que la majorité des membres, à l’exception de la Chine, ont préparé le même speech contre la Russie. De même dans le château de l’Elysée, symbole de fierté de la France, les Chefs d’Etats de l’UE ou leurs représentants n’ont fait qu’insister sur les sanctions contre la Russie pour l’affaiblir et la pousser à se replier. Longtemps rassemblés contre   l’ex-URSS, les Etats occidentaux ont de nouveau l’ennemi commun russe, qui touche au fond leurs intérêts. Les Etats européens dépendant de l’énergie russe, se sont rendus compte, qu’ils ne vont devenir autonomes des importations de gaz, qu’à partir de 2027.Car, ils ont beaucoup d’installations à construire dans l’immédiat. Ils comptent encore une fois beaucoup sur la promesse américaine à Bruxelles, de fournir à l’Europe 15 milliards de mètres cubes de gaz soit environ 10% de sa consommation globale du vieux continent. Cette quantité n’est pas suffisante et ce n’est pas une solution dans l’immédiat.  Il parait que le choc pétrolier est inévitable.

Le bourbier ukrainien

 Il n’y a pas longtemps les Etats désunis de l’Europe n’avaient pas de vaccins contre la pandémie, dépendaient des importations et devenus acteurs principaux des guerres de vaccins. Maintenant, encore une fois, ils manquent de souveraineté énergétique. Ils sont obligés de se faire ravitailler principalement par les EUA, la Norvège, le Royaume Uni, le Moyen-Orient[3], la rive sud[4] et occidentale[5] de la méditerranée, l’Afrique atlantique[6] , le Venezuela[7], l’Equateur et l’Azerbaïdjan[8] . Mais, ils n’ont pas la baguette magique pour réaliser leurs aspirations. La majorité des Etats exportateurs de l’énergie veulent rester neutres et ne pas s’aligner avec la coalition occidentale. Par contre la Russie est toujours gagnante, car elle pourrait exporter son gaz à l’usine du monde et à d’autres pays de l’Asie, sans se préoccuper de la monnaie et s’il le faut, faire des trocs. L’utilisation dans les transactions financières du Rouble russe, du Yuan chinois, de la Roupie indienne et autres monnaies pourraient nuire au Dollar et à l’Euro. L’Inde à intérêt d’acheter le pétrole russe qui se trouve à proximité de ses territoires et en même temps avec sa propre devise nationale, sans se soucier d’une réserve en dollars ou en Euro.  Désormais, on dirait que l’Occident a créé les sanctions pour se tuer lui-même. Mais, jusqu’à quand ?

 Les discussions avec les Etats du Moyen-Orient et d’autres pays exportateurs du pétrole, même ennemis de l’Occident, n’ont pas été satisfaisantes. Les alliés traditionnels n’ont pas voulu réviser à la hausse leur production énergétique, afin de ne pas perturber les cours du pétrole sur le marché international. La position de l’Arabie saoudite, nous rappelle le choc pétrolier de 1973, lorsque le Feu Roi Fayçal a refusé de livrer le pétrole aux pays occidentaux pour les pousser à rectifier leur politique au Moyen-Orient et en particulier en ce qui concerne la Palestine. Cette fois ci, l’Arabie veut une reconnaissance occidentale quant à sa guerre au Yémen et aussi fermer le dossier des droits de l’homme.  

Les iraniens feront de même pour clore le dossier de l’énergie nucléaire, débloquer les comptes bancaires objets de sanctions et réhabiliter la Garde Révolutionnaire qui fait partie de la liste des groupes terroristes. L’Algérie à son tour, pourrait utiliser le gaz comme arme géopolitique contre l’Espagne suite à sa reconnaissance du plan d’autonomie marocain sur ses provinces sahariennes. Les régimes de sanctions entre antagonistes ne feront que déstabiliser l’économie internationale. La crise ukrainienne va encore diminuer la croissance mondiale. Selon les prévisions de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED)[9], la croissance de l’économie mondiale va baisser de 3,6 à 2,6% pour 2022.

Cette fois ci l’Europe n’est pas très désunie. La politique de dédollarisation encouragée par la Chine, la Russie et d’autres nations pourrait ruiner les EUA et mettre à plat les bailleurs de fond : Banque mondiale et FMI. La monnaie chinoise est désormais de plus en plus reconnue dans les échanges commerciaux et les payements des factures. Les indices précurseurs d’un possible changement de la capitale financière du monde, dans le moyen terme, n’est pas écartable.  

Une défense variable des antagonistes

 La crise ukrainienne a été bénéfique pour la majorité des européens, en vue de repenser une stratégie européenne de défense commune. Longtemps, l’Europe qui dépendait des atlantistes, soudainement elle veut avoir sa propre force militaire. En attendant, la coalition européenne contre la Russie n’a pas d’autres alternatives énergétiques. Certains Etats européens et ceux qui les soutiennent, pour calmer leur population, vont sûrement continuer à importer le gaz de la Russie. Le monde occidental, à l’exception des EUA ou le Royaume Uni qui ont des réserves en énergie et en vivres, a été pris au dépourvu et les indicateurs cités, parmi d’autres, annoncent bien son déclin et son isolement diplomatique.

Les militaires et les résistants ukrainiens ont ralenti la progression des forces russes, mais sans protection aérienne, ils sont à découvert. Ils ont besoin de la composante air avec les systèmes de défense aérienne, sinon ils ne font que retarder les opérations sur le terrain. C’est vrai que les russes attendaient à ce qu’ils soient reçus comme des libérateurs et n’ont pas prévu une aussi farouche résistance. Cependant, il est à craindre que les russes jouissant d’une forte renommée internationale en matière du jeu des échecs, ne semblent en train de préparer leur coup de maître en annonçant un échec et mat aux ukrainiens. Ces derniers doivent s’attendre à préparer un armistice en faveur de la Russie.

 Dans tous les cas le terrain avec sa géographie et son climat est favorable aux russes. Les militaires de la Russie bien endoctrinés et disciplinés se réfèrent à leurs grands-pères, habitués à défendre l’Empire des Tsars, qui hélas se composait en plus des Grands- Russes, des Petits-Russes et des Biélorusses. Jusqu’à présent les russes n’ont engagé que le tiers de leurs forces classiques et n’ont pas utilisés les moyens auto chars et aériens de dernière génération. Les tirs pour la première fois avec des missiles hypersoniques ne sont pas seulement à titre expérimental. Il s’agit de montrer au monde la puissance russe en la matière et rappeler aux Etats voisins, qui ont accordé à l’OTAN l’utilisation de leurs frontières, les conséquences qu’ils risquaient à l’intérieur de leurs territoires.  

 Les portes- avions et les autres navires de guerre n’échapperont pas à ce nouveau système d’arme. Les combattants tchétchènes habitués aux combats des rues et, si c’est vrai, les combattants importés de la Syrie et de la Libye ou les Wagner expérimentés aussi dans le même combat, pourraient changer l’équilibre de ce conflit. Les russes ont vite développé la guerre par délégation, qu’ils ont hérité des anciennes guerres et insurrections orchestrées par l’ex-URSS. La visite symbolique du président américain, effectuée le 25 mars 2022, dans une base abritant des militaires américains en frontières polonaises, n’est pas suffisante pour mettre en confiance les membres de l’OTAN et arrêter la campagne russe.

L’Allemagne qui espérait augmenter son budget militaire à 100 milliards de dollars aura besoin nécessairement de ces matières afin d’honorer sa dépense et son potentiel militaire. Aussi, cette somme ne fera rien contre la Russie qui est grande puissance militaire et une vraie cyber puissance. Par contre, la plus importante décision prise par l’Allemagne c’est son retour prochain en tant que puissance militaire au sein de l’Europe. Ce feu vert du locataire de la maison blanche, donné à l’Allemagne, objet de sanctions au lendemain du second conflit mondial, lui permettrait sûrement de réviser son dispositif militaire et constituerait un nouvel ordre européen face à la France et aux autres puissances du vieux continent.

Le Japan à l’instar de l’Allemagne pourrait devenir une puissance non négligeable en Asie. Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, suite aux sanctions des alliés, seule la gendarmerie royale nipponne possédait les sous-marins et les matériels majeurs. Cette crise ukrainienne va lui permettre en accord avec les EUA de renforcer ses potentiels militaires. Car les ennemis communs de l’Occident sont les tiens. Les menaces de la Corée du Nord[10] et de la Chine[11] ne sont pas négligeables. Aussi le Japon ne cesse de réclamer ses quatre iles[12]  de l’archipel des Kouriles. Mais, la Russie vient d’annoncer le 21 mars 2022 son intention d’abandonner les discussions de paix sur le sujet.

La richesse d’un vaste territoire en situation de convoitise

Avant la campagne de Russie, la majorité de la communauté internationale ignorait la géographie et les richesses des terres de l’Ukraine. Ce conflit a dévoilé bel et bien une nouvelle forme de crise économique en cours. Tous les États qui dépendent du monopole russe en matières stratégiques ou qui ont une relation économique étroite de commerce ou d’investissement avec la Russie ou l’Ukraine, vont enregistrer dans les prochaines semaines de graves pénuries. Car, si la guerre continue et qu’aucune sortie de crise n’est envisageable, il faut s’attendre au pire.  

Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), les prix alimentaires mondiaux vont enregistrer des hausses entre de 8 à 20%. Ce conflit pourrait être à l’origine d’une baisse des exportations de blé provenant de la Russie et de l’Ukraine. Il y a lieu de signaler que 35% de la population mondiale dépend des céréales et des oléagineux. Entre 8 et 13 millions de personnes seraient touchées par la malnutrition. D’ailleurs, la Russie est le premier vendeur du blé dans le monde et l’Ukraine se situe en cinquième position. Les deux Etats fournissent au monde 19 % de l’orge, 14% du blé, 4% du maïs et 52% de l’huile de tournesol. De surcroît, l’Ukraine jouit de la plus grande superficie de terres arables d’Europe soit 25 % de terre noire de la planète, elle fournit d’autres produits agricoles.  

Sujet de convoitise entre les puissances pour ses richesses, sans aller loin en Afrique, considérée septième réserve mondiale du charbon, le sous-sol ukrainien regorge parmi d’autres, des quantités très importantes en uranium et en minerais tel que le titane, le manganèse, le mercure et le fer qu’elle transforme dans ses fourneaux au profit de l’industrie lourde. Au niveau mondial, l’Ukraine produit, en matière de gaz rares, quelque 50% du néon et environ 40% du krypton, et qui demeurent nécessaires à la fabrication des semi-conducteurs.

Ces deux produits ont vu leur prix augmenter en flèche et au cas où leurs usines arrêtent la production, le monopole reviendra, comme pour les terres rares à la Chine qui reste le premier allié russe. Le manque sur le marché de ces deux richesses se répercute particulièrement sur la technologie de pointe telle que les puces électroniques, les consoles de jeux, ainsi que d’autres composantes utilisées dans l’industrie de pointe, l’industrie automobile de l’aviation et de l’espace. Cela vient juste après le manque de composantes électroniques enregistré suite à la fermeture d’usines, provoquée par la pandémie, particulièrement au Taiwan. D’autres pays de l’OTAN et de l’Asie concernés par la crise ukrainienne ont aussi besoin de ces puces pour fabriquer plus d’engins militaires.  

Dans le sillage du conflit ukrainien, il est fort probable que les pays du sud laissés à la traîne à cause de la pandémie et désavantagés en ce qui concerne la géopolitique du vaccin, pourraient ne pas s’attendre à des aides, au cas où le prix des produits alimentaires ne soit plus à leur portée. D’ailleurs, ces dernières années certains Etats africains francophones, ont changé de cap et ont renoué des relations étroites avec la Russie, la Chine et certaines puissances émergentes de l’Afrique. Si en cas de pénurie, la Russie leur vend les produits dont ils ont besoin, avec des tarifs préférentiels, ils vont sûrement changer de veste et d’idéologie politique en tournant le dos à leurs alliés occidentaux qui les ont suffisamment asservis.  

A la lecture des prémices actuelles la crise ukrainienne aurait impacté la communauté internationale de telle façon qu’on s’attend aujourd’hui plus que jamais et avec impatience à l’avènement d’un nouvel ordre mondial.  Cette campagne d’Ukraine ne s’éternise pas, mais va perdurer dans le temps. Ses conséquences socio-économiques pourraient être plus que pessimistes pour les nations dépendantes de certains produits stratégiques. Encore une fois, il y a lieu de rappeler aux responsables gouvernementaux d’encourager dans leurs pays, la constitution des dépôts de réserves stratégiques de toutes les matières premières.

 Seront épargnés de cette crise mondiale, seuls les Etats qui ne se limitent pas à un seul partenaire économique ou fournisseur   en matière d’approvisionnement des matières stratégiques (qu’elles correspondent à l’alimentation ou à l’industrie avec ses différents volets. C’est une leçon dans l’avenir pour les Etats qui veulent ne pas dépendre d’un seul marché et qui souhaiteraient diversifier leurs partenaires économiques, afin d’assurer des réserves nationales selon l’ordre de priorité affiché pour les matières stratégiques les plus consommées.

 Face à la pénurie du blé ou des autres céréales consommés, les Etats doivent anticiper en organisant des campagnes de sensibilisation afin de diminuer la consommation de ces denrées et les remplacer par autre chose. Pourquoi ne pas remplacer les céréales par le manioc ? Sinon avoir des partenariats avec les pays africains, qui ont beaucoup de précipitations de pluies, en vue d’utiliser leur sol à la culture des produits trop demandés. Le Soudan ou l’Afrique de l’Ouest ne manquent pas d’eau et d’espaces. Ça sera gagnant, gagnant pour les deux côtés. La leçon de la campagne d’Ukraine n’est pas unique en son genre. Elle ne sera qu’une suite défavorable, à la récente page ouverte par la pandémie, que le monde vient juste de tourner dans le recueil dédié à l’histoire humaine.


[1] Le Kremlin déclare que l’OTAN, n’a pas respecté les accords verbaux entre les présidents américain et de l’ex-URSS, concernant le respect des tracés frontaliers du monde bipolaire et la non adhésion des pays satellites à hl’OTAN. La Russie héréditaire de l’URSS se voit encerclée et menacée dans son glacial directe.

[2] Groupe de 5 pays qui se réunissent annuellement depuis 2011 et composé Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud.

[3] Les pays du Golf qui pourraient fournir du gaz à long terme sont le Qatar et l’Iran. Les autres aussi à court terme.

[4] L’Algérie, la Libye l’Egypte, Israël, (le Liban, la Syrie et la Palestine n’ont pas encore réglé leur problème frontalier en mer) et le Maroc pourrait créer la surprise au moyen terme.

[5] Le gaz trouvé par les compagnies italienne et française aux alentours de Chypre pourrait être exploité si les prix sont en hausse et si la Turquie trouve un accord avec Chypre et la Grèce.

[6] Le Pétrole ou le gaz se situent sur le littoral atlantique entre la Mauritanie jusqu’à l’Angola. Le Nigéria en particulier pourrait être à l’origine d’un gazoduc traversant la rive atlantique pour exporter le gaz aux Etats africains de son voisinage et passer par la frontière marocaine avant d’arriver en Europe. Mais ce n’est qu’un projet qu’il faut encourager d’urgence.

[7] Cet Etat longtemps sanctionné pourrait se racheter en participant à l’effort de guerre contre la Russie. Mais ne veut pas changer son alliance.   

[8] L’Azerbaïdjan fournie principalement le gaz à la Turquie et à son voisinage du Caucase.

[9] Lire le bulletin quotidien de l’ONU du 24 mars 2022 sur :  news.un.org

[10] Menaces permanentes par la Corée Nord   avec ses tests de missiles balistiques.

[11] Les iles Senkaku ou Diaoyou au nord Est de Taiwan constituées de cinq iles et trois rochers.

[12] L’archipel est constitué des 4 iles ci-après : Kunashir, Habomai, Iturup et Shikotan, annexées par l’ex-URSS en aout 1945.