Alors que le Maroc pose de plus en plus ses jalons traditionnels en Afrique et ailleurs par sa diplomatie séculaire marquée par l’ouverture, la politique extérieure française n’est plus, comme auparavant entendue à l’étranger. Cette cinquième république qui a toujours su gérer le dossier du Maghreb se voit confrontée à des défis auxquels, elle ne peut plus faire face. La France a oublié les sacrifices du royaume, lors du premier conflit mondial, les 850 000 marocains morts aux champs de bataille, pendant la deuxième guerre mondiale, pour la libérer de l’envahisseur nazi. Cela sans compter les populations résistantes tuées à tort et considérées terroristes.
Ces évènements se sont déroulés alors que le Maroc a été injustement sous protectorat et divisé entre deux empires coloniaux. Pourtant, le Royaume considéré pendant plusieurs siècles une puissance régionale, a toujours été une terre de tolérance. Et ce n’est pas une faiblesse !
La lenteur dans le changement
Les investisseurs français et les migrants français sont nombreux au Royaume et pourtant la nouvelle diplomatie de la république a choisie de jouer avec deux visages. Si elle le fait en Lybie ou ailleurs, ça pourrait se comprendre autrement. Mais, avec un pays considéré ami et allié ni la population, ni le gouvernement, ne pourraient admettre cette manière d’utiliser le pouvoir du mot. Les marocains et tous les africains ont besoin d’une relation égale à égale. Cela suppose un changement, longtemps attendu, dans la stratégie française. De quel droit les gouvernants français continuent de critiquer leurs homologues à côté de leurs sujets ? N’est-il pas de l’orgueil ?
La France considérée berceau de la démocratie européenne a souvent critiqué ouvertement les pays du Sud pour le non-respect des droits de l’homme. Mais ces dernières années, c’est elle qui les bafoue. Depuis la pandémie à nos jours, c’est la matraque qui fait l’ordre. Les descentes policières permanentes, dans les villes, face aux manifestants, n’ont pas besoin de commentaires[1]. Ces bouleversements ne sont pas loin de l’insurrection. Si c’était au Sud, c’est ce qualificatif qu’aurait dû utiliser les médias français. Au lieu de regarder ailleurs, il vaut mieux surveiller chez soi. Désormais, la cage française est aussi en verre !
A travers son histoire, le Royaume a toujours été ouvert à tous les pays du monde. Ce n’est pas aujourd’hui qu’on va se demander pourquoi, il a établi des relations ou investi quelque part. La route de caravane a existé pendant des siècles entre le Royaume chérifien et la profondeur africaine et aussi avec les Etats Unis d’Amérique. Même en relation avec Israël, le Royaume est souverain dans ses choix stratégiques. Donc selon la logique du gouvernement français, le gouvernement marocain doit à son tour par principe de réciprocité demander à la France des comptes rendus sur ses relations politico-économiques ou même instaurer un système de visa rigoureux.
L’intérêt français est dans un Maroc prospère
La France doit comprendre que c’est dans son intérêt d’avoir un Maroc prospère en Afrique. Car, il pourrait lui être plus utile que les nouveaux arrivants, constitués de puissances émergentes, qui menacent ses intérêts stratégiques. Jamais la république n’a été aussi endettée[2]. Avec l’histoire commune partagée depuis des siècles et la langue française parlée par les deux pays, la république pourrait renforcer son partenariat avec le Maroc afin d’atteindre ses objectifs et faire face à son déclin multiforme. Les sociétés françaises implantées au Maroc pourraient bénéficier de la présence marocaine en Afrique pour exporter leurs produits et leur savoir-faire.
Il n’est plus un secret dans le monde, que celui qui continue de déstabiliser le Maroc n’est que son voisin de l’Est, pour lequel il s’est longtemps sacrifié dans le but de le voir indépendant. A part si la France veut suivre la même voie, elle sera surement perdante et déçue par le reste de la communauté internationale. Le monde des colonies a disparu. Il y a lieu de rappeler que le témoignage des auteurs et des hommes d’Etat français citent tous que lors de l’instauration du protectorat, le royaume Alaouite reconnu internationalement, avait des infrastructures, des médinas, d’immenses territoires, une administration gouvernante, des forces de l’ordre et tout ce qui se rapporte à un Etat moderne. On n’a pas besoin de le comparer avec les autres colonies.
La France ne doit pas fuir ses responsabilités et s’attaquer à ceux qui remplissent le vide qu’elle laisse. Elle avoir un seul langage diplomatique. Aussi, les archives de la Vème république doivent guider le bon sens des gouvernants français pour décider de la marocanité du Sahara récupérée. ON ne peut être dans les deux camps. Car, la stabilité du Maroc et du Maghreb sera utile pour une France devenue instable en interne, en outre-mer et attaquée par ses réels rivaux en Afrique ou dans le monde.
[1]Concernant le prolongement de l’âge de retraite en France, le vote au sein de l’organe législatif est flou et douteux.
[2] A la fin de la pandémie elle dépassait les 2200 milliards d’Euros et ces derniers mois, on parle de plus de 3000 milliards soit 111,6% du PIB contre 112,9 % en 2021.
Zakaria HANAFI
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HANAFI ZAKARIA Docteur en relations internationales, conférencier et expert en géopolitique et sécurité de défense.