Docteur d’Etat en fiscalité internationale,
Professeur en droit des affaires Gérant du cabinet MBA-Stratégies fiscales
Les enjeux de la médiation et de l’arbitrage fiscal
Dans son discours prononcé en 2009, à l’occasion du 56e anniversaire de la révolution du Roi et du Peuple, Sa Majesté́ le Roi Mohammed VI avait souligné́ la nécessité de « développer les modes alternatifs de règlement des différends comme la médiation, l’arbitrage et la conciliation ».
Le même message a été́ rappelé́ aux participants à la deuxième conférence internationale sur la justice, organisée à Marrakech les 21 et 22 octobre 2019, sous le thème : « Justice et investissement : défis
et enjeux » en appelant une institutionnalisation des modes alternatifs de règlement des litiges. Tout le monde a intérêt à repenser la régulation des litiges à l’amiable sans pour autant les remettre entre les mains d’un juge faisant figure d’autorité́. Il est difficile de prévoir les conséquences d’un recours judiciaire qui est souvent long, couteux, stressant et à l’issue aléatoire. Et, quand on introduit un recours en justice, on ne sait pas quand et comment on va s’en sortir.
Il existe au Maroc la médiation inter et intra entreprises, la médiation bancaire, la médiation des assurances et la médiation sociale. La loi reconnait la possibilité́ pour les parties à un conflit de régler, si elles le souhaitent, leur différend par voie de médiation ou toutes autres voies. Cependant, les modes alternatifs de résolution des conflits peinent à s’installer au Maroc pour de multiples raisons, entre autres, la carence en matière de formation, de communication, de sensibilisation tous azimuts ou encore de la pression exercée par des lobbys pour freiner sinon empêcher leur institutionnalisation.
Un projet dédié à l’arbitrage et à la médiation conventionnelle a été adopté le 5 mars 2020 par le Conseil de Gouvernement. Il constitue un code juridique à part entière, totalement séparé du Code de procédure civile. Pérennisation des partenariats La médiation est devenue une branche à part entière, plus fréquemment utilisée parmi les modes alternatifs de règlement des différends. Aux États-Unis, elle est intégrée dans le système judiciaire depuis les années soixante. En France, les réformes successives attestent la volonté́ réaffirmée des pouvoirs publics en faveur de la médiation. Citons pour mémoire, la Loi du 8 février 1995 qui a institué́ la médiation judiciaire dans le Code de procédure civile.
La médiation, comme l’arbitrage, suppose l’existence d’un litige et l’intervention d’un tiers dont la mission est d’œuvrer dans le sens de la résolution de ce litige. La médiation prend fin par une solution que les parties elles-mêmes ont négociée. Cette transaction est opposable aux parties et possède la force de la chose jugée, obligeant ainsi les parties à mettre en œuvre la solution négociée, objet de la transaction. Le Président du tribunal territorialement compétent est saisi par la suite pour y apposer la mention exécutoire.
L’arbitrage fiscal
Il convient de souligner opportunément qu’en droit fiscal marocain, le recours à l’arbitrage fiscal est prohibé s’agissant d’un litige de nature fiscale. C’est ce qui ressort de la lecture de l’article 244 du CGI « les litiges relatifs à l’application de la loi fiscale ne peuvent faire l’objet d’arbitrage ».
Règlement du contentieux fiscal
Il existe, toutefois, des instances qui statuent sur les litiges fiscaux qui leurs sont soumis par les contribuables conformément aux dispositions des articles 225 et 226 du CGI (cf. tableau ci-après). Il s’agit, en l’occurrence, de la Commission Locale de Taxation (CLT)
et de la Commission Nationale de Recours Fiscal (CNRF).
Ces instances présentent des caractéristiques spécifiques en matière d’arbitrage :
• Elles sont des institutions publiques ;
• Elles sont présidées par des juges et non pas par des arbitres ;
• Elles statuent sur les litiges qui leur sont soumis (questions de fait) et doivent se déclarer incompétentes sur les questions de droit ;
• Elles rendent des décisions qui peuvent faire l’objet de recours judiciaire auprès du tribunal administratif aussi bien par le contribuable que par l’administration fiscale (art.242 du CGI).
Le rôle du médiateur
Le médiateur fluidifie la communication et crée un espace de confiance. Il joue le rôle de garant pour accompagner les parties en conflit. Il facilite leur rapprochement pour les aider à trouver elles-mêmes une solution négociée à leur différend. Elles sont des acteurs et non pas des spectateurs pour la résolution de leurs litiges. Le médiateur est un tiers, neutre, indépendant, impartial et formé à la médiation.
Il ne décide pas et ne tranche pas non plus sur les litiges entre les parties. Il n’est
pas un juge qui tranche les litiges selon la règle de droit en vigueur, dans les
limites des demandes dont il est saisi, ni un avocat, ni un expert, ni un arbitre.
Il n’a aucun pouvoir pour imposer quoi que ce soit pour les parties.
Zakaria HANAFI
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HANAFI ZAKARIA Docteur en relations internationales, conférencier et expert en géopolitique et sécurité de défense.